Ce titre est finalement celui retenu pour présenter mon travail de recherche.

Une recherche intervention demande de problématiser les difficultés professionnelles rencontrées afin de développer du sens, de la compréhension sur les situations vécues. Elle donne la parole aux acteurs, prend en compte leur propre constats et leurs analyses, les implique dans la construction de la problématisation et dans la réflexion de solutions pertinentes. Elles les conduit à prendre de la distance avec leur vécu et à transformer leurs pratiques à la lumière des apports de la recherche.

Dans cette étude il s'est agit de faire sortir les AM de leurs perceptions et croyance pour les conduire vers l'analyse. Cette phase a eu pour but de les pousser à la distanciation, à remettre en cause leurs "idées reçues". Leurs réflexions en entretien collectif ou en situation de formation ont constitué le coeur de cette recherche.

Si les pratiques professionnelles des AM m'étaient connues, en tant qu'ancienne AM, elles m'ont menées à deux constats : une appropriation plus grande de leurs droits et devoirs, qui ne les protègent pas pour autant des problèmes de règlement de leur salaire, et un mouvement prononcé vers le champ éducatif via le projet éducatif. Véritable enjeu de leur emploi et de la qualité de la relation avec les parents employeurs, celui-ci est également un point de référence essentiel pour leur positionnement professionnel. Néanmoins, si le projet d'accueil se formalise de plus en plus chez les AM elles n'en sont pas suffisamment accompagnées dans son élaboration pourtant essentielle pour l'exercice de leur profession. L'accès à la formation continue est freinée par le dispositif du parent facilitateur et le souci de la prise en charge des enfants accueillis pendant le temps de formation ou la fatigue de l'AM face des contrats de plus en plus atypiques dans les temps hors formation. Pour autant elles sont nombreuses à s'y intéresser et suivre les formations proposées.

En outre, certaines peinent à affirmer leurs compétences, ce qui les empêchent d'aller au devant des attentes des parents et de faire une alliance plus aboutie avec eux. Pour d'autres, c'est l'identification des compétences propres au métier qui est difficile à réaliser et de fait elles ne peuvent les valoriser. Ce sont précisément ces compétences qui sont mises en valeur dans leur projet d'accueil.

Cette recherche témoigne de la complexité du positionnement professionnel de l'AM, lié aux spécificités du métier et en détermine son point de référence : le projet d'accueil. Elle met en évidence l'importance de son élaboration pour une AM et celle de sa capacité à le mettre en valeur et à l'ajuster pour être sélectionnée par les parents employeurs. Il est un indice essentiel de sa professionnalité et nécessite un travail de réflexion approfondie. Son positionnement professionnel l'oblige à aller au devant des attentes des parents, ce qui représente une de leur plus grande difficulté :

« Ce que les parents attendent de nous ? Moi je trouve que c’est une question qu’il faut leur poser à eux ! …ça va m’enrichir au bout de 12 ans et j’aurais enfin compris ce qu’elles attendent, au bout de 12 ans, qu’est-ce qu’elles attendent de plus de moi, que j’aie pas respecté ? ».

Cette recherche témoigne de leur implication professionnelle, des ressources qu'elles détiennent, de leur capacité à faire évoluer leur métier et à innover dans leurs pratiques, en dépit des écueils. Elle met en lumière la complexité de leur travail et la nécessité de les impliquer dans ce qui les concerne, de leur proposer un accompagnement adapté et diversifié (temps collectifs du RAM, analyse de pratiques, formations continues) et d'une formation à la hauteur des enjeux de la qualité de l'accueil des jeunes enfants. Cette qualité d'accueil exige une professionnalisation des AM plus aboutie qu'aujourd'hui. Ce que l'accès dans le métier ne garantit pas : pas de réelle sélection via l'agrément (évaluation cadre de vie et jugement de valeur sur aptitudes maternelles et qualités personnelles), procédure allégée depuis 2005, aucun diplôme exigé, orientation en masse de Pôle emploi vers le métier d'AM et basé sur le fait qu'il suffit de s'estimer compétent(e).

Un nouveau profil d'AM émerge : celui de la professionnelle petite enfance, dotée d'une conscience professionnelle, impliquée, engagée dans les réseaux, soucieuse de l'amélioration de la qualité d'accueil des jeunes enfants et de leurs parents. Les maisons d'assistantes maternelles participent de cette avancée dans leur professionnalisation. Elles symbolisent, tout autant que la formalisation du projet d'accueil chez l'AM, les changements en cours dans la profession. Elles les font sorti de leur invisibilité, sortir de leur isolement et des sentiers battus. Elles mettent en lumière leur spécificité : une figure d'attachement important pour le tout petit (46 % des AM revoient les enfants qu'elles ont un jour accueillis chez elle) et un accueil familial chaleureux.